vendredi 21 novembre 2008

Antakya

Iskenderun- Antakya 60 km

Iskenderun est un port principalement pétrolier -le plus au sud de la Turquie- et Antakia (ou Hatey, l'ancienne Antioche) une ville de l'intérieur de 200 000 habitants. Entre les deux, une redoutable barrière rocheuse avec un col de 720 mètres à atteindre en 15 km en partant de la mer.

Autant dire que le démarrage a été dur, surtout que tous les éléments étaient contraires. Non seulement la pente, mais aussi le vent et, nouveauté, la pluie. Si bien que très tôt, j'ai été trempé comme une soupe. Mais il ne fait pas froid et ça aide à faire la lessive.

Et puis les gens sont attendris de voir un vieux fou qui s'échine. Un camionneur me donne un délicieux fruit rouge -un kaki je pense. Et un autre m'arrête presque d'office quand brouillard et pluie se mêlent de la partie près du sommet perdu dans les brumes. Et il me fait entrer dans une salle de repos des chauffeurs de bus de la localité. Une dizaine se chauffent autour d'un poêle en buvant du thé. On m'en offre bien sûr et on me dégage une place pour me sécher en me faisant signe d'attendre que le temps se dégage. Photo pour immortaliser la scène. Mais impossible de savoir si j'étais près du sommet ou pas.

Finalement, le brouillard se lève un peu et je repars un peu séché et rechauffé par 3 ou 4 verres de thé. Heureuse surprise, la pente s'inverse assez rapidement, signe que le sommet était atteint. Mais comme je ne l'avais pas vu, je craignais des fausses descentes qui précèdent traîtreusement des remontées.

Il a fallu 2 ou 3 km de descente pour me persuader que le pire était passé. Il en restait encore 8 et ensuite terrain plat avec toujours la pluie, mais le vent avait eu la bonne idée de changer.

Heureusement, j'avais acheté des bananes à mi-course, ce qui me permettait de tenir le coup pour arriver le plus vite possible à Antakia pour me mettre au sec.

Maintenant, j'ai la liste des Teacher's Houses qui semblent couvrir la Turquie d'un réseau assez dense. Ils sont très confortables, bien equipés et l'ambiance très sympathique. Donc je visais celui d'Antakia.

À mon arrivée. après la première prise d'information, trois délicieuses adolescentes se proposent de m'y conduire. Vous voyez, je n'attendris pas que les routiers!

Je compte y rester 2 ou 3 nuits pour affronter la frontière syrienne lundi , à des heures ouvrables de bureau en France et en Syrie. Car il est bien possible que j'en ai besoin.

Cela me permettra de découvrir un peu cette ville mythique où serait né le terme de chrétien. Et aussi de me reposer avant, j'espère, d'avancer en changeant de pays.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Cher Gaston
C'est un peu par hasard et par curiosité que j'ai de nouveau consulté ton blog. Je découvre qu'après l'Italie te voilà désormais en Turquie et peut être bientôt en Syrie si j'ai bien compris. Cette quête spirituelle qui exige bien des efforts physiques m'impressionne. Se retrouver seul sur son vélo face au soleil, aux vents et aux intempéries, c'est un sacré défi pour soi même. Et visiblement tu t'en sors fort bien même s'il te faut en certaines circonstances redoubler d'efforts. Le corporel, l'intellect, le spirituel, l'émotionnel, le social, le culturel et l'affectif, tout dans ton périple se mélange et s'entrechoque. Se former, c'est se mettre en mouvement, se déplacer, se retourner comme si l'on était appelé par. Ce n'est pas sans conséquences anthropologiques car cela pourrait laisser entendre que l'on ne s'appelle pas soi même mais que l'on est aussi appelé par. Cela me rappelle ce que disait Marie de l'Incarnation lorsqu'elle débutait son récit : c'est à la demande de mon divin époux que j'écris mon histoire. Mais se former c'est aussi s'accorder des moments de pause pour prendre rendez-vous avec soi même (le fameux paradigme de l'auto). Ces pauses salutaires et réparatrices à l'hôtel ou dans une église permettent le repos de l'âme et du corps - repos qui annonce un renouveau. Je trouve que cette entreprise est riche d'enseignements car elle montre que cette "nouvelle mise en selle" dans ta vie permet de gérer ce passage d'une vie professionnelle fort riche à une vie post professionnelle qui prend le chemin d'une quête spirituelle s'apparentant au chemin de l'exode. Cette philosophie de l'exode a été fort bien analysée par Lévinas qui rappelle que le peuple d'Israël qui brise ses chaînes en quittant Pharaon ne se lance pas pour autant sur la voie de l'autonomie. Mais en toute liberté il décide de briser une hétéronomie en vue d'en adopter une autre. C'est sans doute le sens qu'il est possible de donner au qualificatif spirituel : c'est une sortie de soi sans retour à soi car au bout du chemin, l'errant finit par rencontrer Dieu.
Amitié à toi cher Gaston et au plaisir de te revoir. Jean-Yves Robin.