Remontée en 5
jours par la Patagonie atlantique, ou 2500 km en Chantita. Ouf!
Le lundi 7 est marqué par une invitation dans
une estancia où Vedrana Bronzovich, une amie de Manu, nous invite. Vedrana est Baqueano de la Tierra del Fuego, agente de tourisme et propriétaire avec son frère
d’une estancia de 9000 hectares. Leur père, yougoslave, l’a créée à
partir d’une entreprise de bois. Vedrana essaie de devenir guide d’exploration écologique.
Dans l'estancia, nous avons pu assister à une marcation
: marquage des bêtes au fer rouge, pour identifier le propriétaire et faire la désinfection,
sans oublier la taille à l’oreille et le n° d’identification, la vaccination et
la castration des jeunes mâles. C’est une activité intergénérationnelle qui
permet aux jeunes de s’initier au savoir des gauchos : capture des
animaux au lasso et immobilisation musclée. Cela se fait dans une ambiance de
fête familiale, marquée par le légendaire asado argentin. Nous avons assisté
à sa longue préparation, mais sommes partis avant la dégustation complète.
Attentive, Vedrana nous a quand même fait préparer un échantillon délicieux.
Ce marquage
est une opération spectaculaire et éprouvante pour les non-initiés. Ceci fut
pour nous une belle illustration de la confrontation des métiers de survie locaux
dans un contexte de débat sur le rapport aux animaux et à l’alimentation
carnée. Le tout se termina par une chevauchée en 4x4, petit camion Toyota à 5 places avec plateau arrière
et arceau de sécurité, véhicule symbolique de la Patagonie, à travers des chemins
ouverts par le
papa, entretenus par les enfants, à travers un cours d’eau et au bord de
magnifiques lacs sauvages travaillés à l’occasion par des castors.
Dans les
années 50, des Canadiens, avec l’idée lumineuse de faire commerce de fourrures,
ont introduit 3 couples de castors. Résultat de l’opération : il y a maintenant
des milliers de castors qui transforment l’environnement de la Terre de Feu, à la grande inquiètude des
habitants. Reste à dire qu’il n’y a là pas d’autre prédateur pour les castors
que les humains.
Reprenant la
route, nous avons eu à passer deux fois la frontière entre Argentine et Chili, tout
en ayant à traverser le détroit de Magellan. Le découpage de la Terre de Feu entre ces deux pays ne permet pas aux Argentins d’accéder
directement à la partie argentine de la Tierra
del Fuego. L’opération se termine à 2 heures du matin avec l’ultime bac de nuit, les trois cyclosophes étant dans leur couchette, s’en remettant à Manu,
la Chanchita et le bac, dans un demi
sommeil, perplexes quant aux divers mouvements des véhicules.
Le mardi 8 et le mercredi 9 : remontée par la Patagonie
atlantique
Nous nous
engageons sur la route n° 3 pour environ1500 km, jusqu’à Comodoro Rivadavia, qui nous fait découvrir l’immensité quasi
désertique de la steppe patagonienne avec des lignes droites sans fin. Arrêt
pour dormir dans la steppe après Puerto San Julian. Au matin,
Michel reprend ses habitudes de jogging et résiste à Gaston qui veut l’entraîner
jogger dans la steppe.
Quelques
distractions quand même grâce à la présence d’animaux, guanacos, parfois solitaires,
parfois en troupeaux, des myriades de brebis et leur agneau,
des renards, de magnifiques oiseaux, quelques bovins et de superbes chevaux. On
voit, mais rarement, un gaucho sur son cheval, parfois accompagné de chiens,
partant pour rassembler le bétail.
Le vent, aux
allures fortes et capricieuses, est toujours au rendez-vous, sous un ciel
variable, avec parfois de spectaculaires nuages aux allures effilées. Rarement, apparaît une petite agglomération de quelques cabanas, appellation donnée aux gîtes pour rares touristes en cette
période de l’année.
Le Lonely Planet se demande si le Petit prince était patagon. En effet, Antoine de Saint-Exupéry fut directeur de l’Aéropostale Argentina de 1929 à 1931. Il survola souvent ces régions quant il faisait cap vers Punta Arenas au Chili. On trouve des
images de ces environnements dans le Petit
Prince, Vol de nuit et Terre des hommes.
On sort de la route
n°3 pour entamer la traversée est-ouest sur la route n°20. On dort à Gabernador Costa qui, comme toutes les
localités de cette région, n’ont comme presque unique patrimoine que le ciel et
la terre.
Le jeudi 10, retour vers la Cordillère et dernière nuit dans la Chanchita.
Cette journée
nous fait redécouvrir des reliefs, de la verdure, des lacs et des fleurs.
Manu nous
entraîne dans le parc Los Alerces au
niveau d’Esquel et nous déniche un
endroit près du lac Rivadavia où les quatre éléments sont réunis de
façon sublime.
![]() |
Gaston sur le lac de la Zeta |
On terminait
ainsi notre périple près d’un lac aussi resplendissant et inspirant que le laguna de la Zeta où nous avions eu notre premier réveil.
Ce lac avait inspiré à Gaston la lecture du poème de Pierre Dumilan: Je t’offrirai
la terre. Il la termine avec la dernière strophe sur le feu et le Monde.
Pour les amateurs, voyez sur la toile. Découverte du Fernet, apéritif national des Argentins,
et asado, rituel final autour du
feu.
Pour la
première fois, ciel étoilé et découverte d’une croix du sud par Michel. Elle
nous émerveille, même si c’est une nouvelle croix, un peu trop au nord, ce que
Michel confirmera le lendemain suscitant une grande déception. Sa vue ne nous
sera offerte que lors de notre prochaine incursion en hémisphère sud,
probablement avec un nouveau véhicule qui pourrait s’avérer une chaise
roulante, motorisée, souhaite
Gaston.
Le vendredi 11, retour à San Carlos de Bariloche.
Après trois
semaines, la végétation du printemps a explosé et ce retour est salué par un festival
de fleurs aux multiples couleurs. Lupins multicolores, le jaune des genêts, le
rose des églantiers et d’autres, inconnues.
On retrouve la
maison précédant notre départ qui nous offre un confort très bienvenu après
trois semaines mêlant immensité et promiscuité. Les barbes ont poussé, les
corps se sont encrassés, les esprits, assainis (à prouver dans la durée),
heureux du périple accompli d’où, a
posteriori, on peut mieux mesurer l’ampleur des risques pris. Pas d’incident
majeur, même si certaines situations nous les ont fait frôler.
La pluie de ce
12 décembre nous porte à l’écriture et demain nous prévoyons
faire une
boucle superbe, paraît-il, autour de Bariloche.
1 commentaire:
Bravo les cyclosophes et bravo Manu et la célèbre Chanchita! Merci pour ces beaux récits qui nous font vibrer. Merci pour le magnifique poème.
Profitez bien de la dernière balade autour de San Carlos.
Bientôt ce sera notre tour d'aller voir L'Argentine, guidés par Manu.
Bon vent à tous les trois.
Amitiés
Agnès
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